Un éléphant qui se baladait...| Abel P. Fox

C'était comme si un volcan était en éruption. La chaleur était épouvantable. Et les rangées mignonnes ne semblaient pas tellement effrayées par cette grande chaleur. Elles fondaient un peu mais rien d'alarmant. Quelqu'un d'autre aurait déjà été calciné, et même tué face à ce brasier mais pas elles. Le mince crépitement qui se faisait entendre avait l'air de dire qu'elle aimaient plutôt ça. Et puis un bruit unique, seul mais pourtant présent durant quelques secondes, rompit le silence ambiant. Un « ting » sonore émana du four qui finissait de cuire les muffins aux pépites de chocolat. Toute ce petit remue ménage pourtant bien ordonné se trouvait dans l'appartement d'Abel Fox. Le jeune homme avait décidé de faire de la pâtisserie. Une de ses grandes passions était la cuisine. Depuis tout petit il avait appris, avec sa grand-mère. Elle avait su lui donner le goût des bonnes choses et surtout l'art de faire à manger. Salé, sucré, il était devenu à l'aise avec toute sorte de préparation sans pour autant prétendre être un grand chef. Personne en tout cas ne c'était jamais plaint de sa cuisine. Il faisait vraiment ça pour le plaisir et n'hésitait pas à gâter ses amis avec ces douceurs faites maisons. Cela lui prenait comme ça de vouloir cuisiner. Une envie qui lui passait par la tête et hop l'instant d'après il était aux fourneaux. Il fallait rajouter aussi qu'Abel était autant cuisinier qu'il était gourmand. C'était surtout un prétexte pour manger encore et encore. Heureusement qu'il avait un bon métabolisme et qu'il faisait du sport sinon il serait déjà devenu aussi large que haut. Un vrai estomac sur pattes. Mais où était-il?

Sous la douche. Et c'est pour cette raison qu'il n'entendit ni ne vit son téléphone portable s'agiter lui signifiant que quelqu'un l'appelait. Non Il était sous le puissant jet d'eau chaude, les mains contre la paroi carrelée le visage vers le liquide jaillissant en continue. A quoi pouvait-il bien penser? C'était difficile d'un point de vue extérieur de le deviner. Cet homme pensait de toute façon toujours à mille choses dans le même moment que parfois lui-même en avait le tournis. Si on plongeait dans sa tête là on savait instantanément que ce qui occupait son esprit c'était comment il allait occuper son après-midi. Pour fois il n'avait rien de prévu. Il avait commencé la journée en allant au cours de chant. Là-bas il pu y retrouver Lou, avec qui il aimait beaucoup chanter. Ils passèrent deux heures avec d'autres étudiants à s'entraîner avec leur professeur. Après cela il quitta son amie et fit un détour par le campus et surtout la bibliothèque où il prit un bouquin pour le dossier qu'il devait boucler. Abel bon élève? Sûrement oui, on ne pouvait pas lui enlever ça. Abel fêtard? Aussi. Etait-ce incompatible? Certainement que non, la preuve par lui-même qu'on pouvait réussir ses études tout en laissant une large place à la détente et à la fête. Il avait de toute façon toujours eu des facilités à ce niveau-là. Bref, le jeune secoua la tête, ne semblant pas avoir trouver ce à quoi il allait consacrer son après-midi. Une chose était sûre, ses petits muffins allaient finir leur course dans son ventre. Un sourire presque carnassier apparut sur son visage lorsqu'il y pensa. Abel se sécha puis enveloppa sa taille de la serviette et revint dans le salon.

La cuisine était visible puisqu'elle était typiquement US, semi ouverte sur le salon. Il huma l'air imprégné d'odeur caractéristique du muffin cuit mélangé à celle du chocolat fondu. Il ferma les yeux pour apprécier cela et il sentit son estomac s'agiter. Dans ces moments-là le jeune homme n'écoutait plus rien. Un bip se fit pour remarquer et il rouvrit les yeux. C'était le signe qu'un avait essayé de le joindre. Il alla donc jusqu'à la table basse, évitant au passage de marcher sur yang qui dormait et prit le portable. C'était Anthony. Un petit nouveau qui venait à peine de débarquer mais avec qui il s'entendait déjà bien. Il fallait dire que ces deux-là avaient tout de suite tellement sympathisé qu'on aurait pu croire qu'ils se connaissaient depuis plus longtemps. Il appuya donc sur la touche de rappel.

« Un petit perroquet ! T’occupe pas de ce que je viens de dire ! Alors ça va ? Alors, tu fais quoi de beau ? »

Pour Abel ce gars resterait toujours une énigme, même s'ils parlaient la même langue incompréhensible pour le commun des mortels. Il fronça les sourcils en l'écoutant prendre la parole. Il fallait dire que comme lui Anthony avait une propension à déballer phrase sur phrase dans un flot continue si on ne l'arrêtait pas.

« Stop! » dit-il en souriant derrière son combiné.

« Hey dude! On t'as mis en mode accéléré aujourd'hui ou quoi? J'ai vu que tu m'avais appelé. Je cherchais justement ce que j'allais faire cette après-midi, mais l'idée d'un safari en plein L.A me plait assez! On se retrouve où pour ça? » lança t-il en faisant des gestes que de toute façon son interlocuteur ne verrait pas. Il ne savait pas trop non plus de quoi il pouvait bien parler, mais il était quand même partant. Si c'était avec Anthony ca promettait dans tous les cas d'être très fun!

« Bon il faut que je m'habille et je te rejoins. Laisse-moi un sms histoire que je me retrouve et je file de chez moi. Ok? See you! »

Il attendit sa réponse puis raccrocha et alla s'habiller. L'odeur des muffins revint à ses narines et il passa par la cuisine pour en goûter un. Une idée lui vint alors en tête. Abel sortit les muffins du four et rangea la moitié dans une boîte hermétique qu'il posa dans un sac. Il en partagerait avec son ami.

Je m’étais donc arrêter net de parler en entendant le stop qu’il venait de me mettre. J’avais une fois de plus parlé trop vite. Il avait eut du mal à me suivre cette fois-ci, mais ce n’était pas bien grave, il avait comprit l’essentiel. Un safari en plein L.A ! Même si je ne comptais pas vraiment aller dans un endroit chaud, dans la savane où quelque part de semblable. Si seulement il savait de quoi je voulais parler. À mon avis il n’en avait aucune idée et c’était mieux j’aimais bien les surprise. Devais-je absolument lui dire de quel endroit fatidique je parlais ? Ce serait sans doute mieux si j’avais l’intention que se rejoigne là-bas. « Haha…c’est une surprise …rejoins moi à la gare et tu verras bien ! » Je n’avais pas de voiture et le seul moyen d’atteindre ce fameux endroit était de prendre un train. C’était encore une chose qu’il y en est un qui aille directement direction le parc d’attraction, car je ne savais pas si je pouvais garder la surprise pour moi.

« Ok ! » Je raccrochais mon portable avant de le mettre dans la poche de ma veste. Je remis mon casque sur mes oreilles avant de sortir de ma chambre universitaire en claquant la porte. Les mains dans les poches, je marchais tranquillement vers le lieu de rendez-vous. Je n’avais pas l’intention de me dépêcher. Être en retard ne me faisait pas peur et vu qu’il venait de sortir de chez lui il ne serait sans doute pas là avant de bonnes minutes et je détestais arriver en avance. Ça pouvait paraître bizarre, mais l’idée d’attendre comme un parfait idiot tout seul, me stressait, d’autant plus que c’est toujours dans ces moments là que tout le monde te regarde. C’est donc après vingt minutes de marches -je n’avais pas réussis à aller plus lentement- que j’arrivais quand même en avance. Je soupirais en voyant personne que je connaissais et surtout, en ne voyant pas l’ombre d’Abel. Bon, je n’avais plus qu’à me faire passer pour un con qui attend que le temps passe.

Je m’adossais au mur et décidais de me faire un petit roulé pour faire passer le temps. Pour une fois ce n’était pas de la beuh. Je préférais la laisser chez moi, car un accident peut-être si vite arrivé. Mon roulé était donc essentiellement composé de tabac et rien d’autre. Une fois fait, un petit coup de feu et le tour était joué. Je soufflais tranquillement toute cette fumée et décidais de m’occuper comme je le pouvais. Je m’asseyais donc par terre et tendis la main en demandant gentiment quelques pièces. Je ne savais pas si je faisais vraiment clochard ainsi, mais avec mon charme légendaire, on pouvait rien me refuser. En l’espace de dix minutes j’avais réussis à récolter six centimes, ce qui était mieux que rien. Ça avait fait passé le temps.

J’aperçu Abel de loin, s’avancer de plus en plus vers moi. Toujours assis, je me tournais pour mieux me mettre dans sa direction. « T’aurais pas une petite pièce pour moi ? » Je fis mes petits yeux de chat potté, mais apparemment ça ne fonctionnait pas vraiment sur lui. « Ok j’ai compris…. » Dis-je sur un ton tout maussade. Je me relevais et passais mes mains sur le derrière de mon pantalon pour enlever les quelconque saleté que j’aurais put me mettre. Le train n’allait pas tarder de toute façon et puis j’avais quand même gagné six centimes, c’était mieux que rien. Je les rangeais dans la poche de mon jean pour éviter de les perdre. « Tu ne connais pas la ponctualité ?! » Je me retournais vers lui prenant tout mon sérieux. « Non mes vraiment, les jeunes de nos jours, ils se permettent vraiment tous ! » Je lui balançais un air plus que désespéré. « Ha tient, voilà le train ! » dis-je mine de rien. Je tirais encore une avant dernière taffe, puis une dernière, avant de finir mon roulé et de le jeter par terre. Tel un meurtrier, je l’écrasais à l’air de ma chaussure pour bien qu’il s’éteigne.

Je montais dans le train avec mon pote et choisis une place assise. Je me faisais vieux et devais me reposer régulièrement. Je lâchais un grand soupire de soulagement une fois assis. « Piouf ! Je me fais vieux moi dit donc ! » Je m’étirais de partout un grand sourire aux lèvres. « Prêt à aller voir des n’éléphant ? » Dis-je en prononçant bien le fameux " n " que tous les enfants avaient tendance à rajouter. Je regardais Abel tout en discutant avec lui en attendant que le train arrive à destination. Même si ça nous paraissait loin à pied, en train ça allait vachement vite. En une heure nous serons probablement arrivé à destination et dieu seul sait qu’une heure ça passe extrêmement vite. Surtout lorsqu’on passe notre temps à discuter de tous et de rien. Chose qu’on faisait tout le temps lorsqu’on se retrouvait ensemble.

Abel était plongé dans ses pensées. Il était barje, ça tout le monde ou presque s’accordait à le dire et à le lui rappeler. Il fallait dire que le jeune homme avait toujours eu une propension à lâcher des théories hasardeuses et des phrases toutes aussi sibyllines. Ses amis c’étaient plus ou moins fait à cela et même si la plupart du temps il se calait sur des conversations censées, il arrivait qu’il déraille sur quelques trains mystérieux. En pensant à cette métaphore l’image d’Anthony lui vint précisément en tête. Si Abel était barje Anthony l’était une dimension au-dessus. Disons que si la déraison était un pays il en serait le maître absolu, Abel son Premier Ministre très certainement. Non parce qu’il avait beau chercher et fouiller dans les recoins de son esprit, jamais il n’avait connu quelqu’un comme lui. Anthony était ce que la population pouvait appelait faute de mieux un marginal. S’il s’arrêtait à leur définition il dirait que ce jeune homme se laissait aller, qu’il était un feignant-né et qu’il avait élevé la paresse au rang d’art de vivre. Mais voilà, Abel ne s’arrêtait pas à cette vision qu’on avait de lui. Quelque part il l’avait pris sous son aile, même s’il ne le réclamait pas. Ils s’entendaient parfaitement bien, leurs théories farfelues se joignant sans heurt à chaque fois. Mais cela n’empêchait pas Abel d’être conscient –à sa place- que la situation du jeune homme deviendrait vite un obstacle pour son bien-être, il fallait qu’il l’aide et qu’il garde toujours un œil sur lui.
Il voulait faire un safari en plein L.A et pour cela il devait le rejoindre à la gare. Il devait avouer qu’il lui manquait plusieurs cases à celui-là. Mais soit. Même si cela le surprenait un peu Abel allait au rendez-vous. Le jeune homme était donc en route.

Comme la gare était loin il avait voulut prendre sa moto hybride mais la laisser seule pendant une journée sans avoir l’assurance de la retrouvée était impossible pour lui. Il prit donc les transports en commun. D’habitude il préférait marcher, mais il n’aimait pas faire attendre les gens et il savait que son pote allait sûrement arriver avant lui vu qu’il semblait déjà prêt. Il était à peine sorti qu’il avait déjà oublié les muffins. Il grimpa les trois étages à une bonne vitesse et choppa les petits gâteaux qu’il mit dans une jolie boîte, claqua une nouvelle fois la porte et redescendit les marches à la même vitesse pour se retrouver sur le trottoir. Abel regarda des deux côtés et choisit d’aller à gauche. Il y avait un arrêt de bus à dix minutes de chez lui qui le conduirait à la gare en autant de temps. Il y serait donc en à peine vingt minutes si le trafic était peu dense, ce qui n’arrivait jamais à L.A. Il marcha donc à bonne allure et pensait toujours en même temps à ce que pouvait bien signifiait l’énigme Anthony du jour. Il était ouvert d’esprit mais là il avait beau chercher, il ne savait pas où il pouvait faire un safari par ici (il s’était vraiment posé sur cette idée). Peut-être qu’il voulait dire autre chose. Où pouvait-on donc voir des éléphants. Il y avait bien un ou deux zoos avec des éléphants et c’était sans doute ça l’idée, mais il n’y avait pas besoin d’aller à la gare pour ça. Tout ceci intriguait vraiment le français qui pourtant souriait. Cela mettrait du piquant à sa journée et puis la surprise serait encore plus prenante.

Marchant avec sa boîte de muffins il aperçu bientôt l’arrêt du bus et bien entendu le bus qui arrivait. Il s’arrêta net puis en faisant sursautant deux passants il tapa un sprint. Slalomant entre les gens il traversa la rue en manquant de se faire écraser, jurant en français pour répondre aux insultes des automobilistes bien qu’il soit en tord et couru jusqu’au bus qui avait commencé à démarrer. Celui-ci s’arrêta en le voyant et il remercia chaleureusement la conductrice. Il resta à l’avant le temps d’observer s’il y avait une place de libre et en avisa une au milieu. Avec personne à côté. Il haussa les épaules et cahin caha il arriva à sa place temporaire. Il s’installa en s’étalant comme il le pouvait. Il regarda sa montre. Le bus repartit et devant lui se mit à dérouler un paysage peu changeant. On pouvait apercevoir la côté entre les buildings, quelques squares où jouaient des bambins surveillés par des mères souriantes ou en colère, des petits bars qui avaient une terrasse sur lesquelles sirotaient tranquillement des quidams. Parfois le bus se stoppait pour laisser descendre et monter de gens et bientôt il aperçu la gare. Il s’arrêta, pile poil dis minutes après y être monté. Abel regarda un instant la devanture de l’édifice avant d’y pénétrer. Il y avait pas mal de monde même pour la période et il se fraya un chemin pour retrouver son ami. Il ne tarda pas à le rencontrer. Il était assit par terre, faisant la manche. Abel soupira et laissa un sourire désabusé trainer sur son visage. Il s’avança jusqu’à lui.

«Tiens ! Salut ! » dit-il en lui posant la boîte dans la main qui quémandait.
« Sérieux, faut que tu arrêtes de faire la manche banane, trouve-toi un boulot ! » dit-il en l’aidant à se relever et en riant en lui donnant une tape dans le dos. Il rit sincèrement à ses blagues, c’était tout lui ça. Anthony avait un culot fou c’était indéniable.

« Aller mange au lieu de déballer des conneries pareilles ! » dit-il pendant qu’ils montaient dans le train où ils trouvèrent des places assises. Etonnement il y avait peu de monde dans ce train-là. Anthony lança le sujet et Abel en profita.

« Bah écoute oui, je suis on ne peut plus prêt haha ! Mais tu m’expliques ? J’avoue que tu m’aurais dis viens on va planter des hibiscus en Laponie j’aurais tout de suite compris qu’en fait tu voulais t’acheter une plante, mais là je sèche ! » avoua t-il en lui souriant pendant que par la vitre le paysage changeait petit à petit.

À la place d’un peu d’argents que j’avais gentiment demandé à mon ami, j’avais eu le droit à une boite bien banale, je me demandais d’ailleurs qu’est-ce que j’allais faire avec, elle ne partirait pas même sur eBay et la fondre pour récupérer le plastique ne me disait vraiment rien. Je la secouait un peu avant d’apercevoir quelque chose à l’intérieur. Serait-ce des gâteaux que je voyais là ? Entrain de bouger et de me supplier d’arrêter de secouer la boite Tupperware afin de ne pas les tuer. Bon, si c’était le désir de mes cher muffins je n’y voyais aucune contrainte, car contrairement à eux, je savais très bien qu’ils finiraient tous par mourir un par un, car tel était leur sort, surtout une fois dans mes mains. Assis dans le train, je les regardais d’un air plus que sadique, les entendant déjà pleurer leur triste sort, ils venaient sans doute deviner ce qu’ils les attendaient. « merci…c’est trop gentil » J’esquivais un sourire toujours les yeux fixés sur ces gâteaux. « ça l’est beaucoup moins pour eux, mais bon, c’est ça la chaîne alimentaire. Les muffins mangent le chocolat, les pépites, la farine et le lait pour ne former qu’un et moi, je mange le muffin, mais….. » Dis-je en laissant un grand suspens à la fin de ma phrase. « Personne ne me mange !!! » Un rire sadique s’échappait de ma bouche et me concentrai de nouveau vers Abel. J’avais sans doute dut attirer les regards de certaines personnes pensant qu’il y avait un fou abord, et ils étaient peut-être pas totalement idiot en reculant de moi, car au moins j’avais plus de place.

Les paroles de ce dernier me restaient sans voix. Moi, trouver un travail ? Était-il sérieux ou bien c’était encore une énième blagounette d’Abel le rigolo ? Je savais qu’il pouvait sortir des blagues beaucoup plus grosses que celle-ci. Combien de temps au juste n’était-il pas sorti pour s’amuser ? Car ces dernières blagues laissaient à désirer, mais je rigolais quand même, pour ne pas le laisser dans sa solitude, car je savais que ça pouvait être très pesant. « Elle était bonne !! » Dis-je en simulant un rire. Je m’arrêtais très vite en ne le voyant pas rire. Ce n’était pas une blague ? Voilà que j’en restais bouche bée. « Banane toi-même d’abord ! » Je marquais une pause avant de reprendre. « Et puis, pourquoi trouver un boulot alors que je peux avoir de l’argent sans effort ? » Je lui montrais alors mes six fameux centimes que j’avais récolté en l’attendant, les secouant devant ses yeux avant de les ranger en lieu sûr. Secouer tout un tas de choses devenait une habitude. J’avais d’ailleurs peur que ça en devienne maladif.

Je ne m’attardais pas plus sur ses paroles qui ne percutaient toujours pas et commença à manger ses petits délices. J’en croquais un premier et émis un petit gémissement tellement que c’était bon. Ça fondait tout seul dans la bouche et le chocolat était tout simplement exquis et je n’avais sur la conscience, aucune mort. « Sans rancune ! » dis-je en muffin déjà à moitié disparu dut à ma seconde bouchée. Je ne regrettais pas d’avoir écouté mon cher ami, car goûter à sa création avait été l’une des meilleures idées que j’avais eu depuis aujourd’hui, après la super activité que je nous avais concoctée. C’est donc la bouche que je réfléchissais quoi lui répondre avant de prendre la parole. « Ha ha ….surprise… » Je crachais quelques miettes provenant de ma bouche sans faire exprès et esquivais un petit sourire en guise d‘excuse, même si ce n’était rien de grave.

Depuis notre rencontre nos idées avait été toutes aussi tordues les unes des autres, mais on arrivait toujours à ce comprendre contrairement à aujourd’hui. Mais le suspens allait bientôt prendre fin, vu qu’au bout d’une heure, le train s’arrêta à destination. Je n’avais pas vu cette heure passer, à croire qu’en montant, nous avions pris un autre fuseau horaire. Tant mieux, car je voulais absolument lui laisser la surprise, mais j’avais énormément de mal à garder ça pour moi. J’étais excité comme une puce et encore, je dirais comme un puceau ayant pris de la caféine ! C’était juste insoutenable et pour lui et pour moi. J’étais descendu sans attendre plus longtemps avant de me diriger vers le parc d’attraction. Je regardais la tête d’Abel lorsqu’il vit ce grand parc. Savait-il maintenant de quoi je parlais ? Avait-il pris de l’argent pour payer le parc ? J’aurais peut-être dut le prévenir et même si ce n’était pas très cher, c’était quand même cinquante dollars par personne, mais bon, après ce délicieux repas que j’avais englouti, je pouvais bien lui payer sa place. Je ne savais pas vraiment d’où je sortais ces cent dollars, mais l’importance c’était de les avoir. Je pourrais même croire que je faisais du trafic et pourtant je ne me souvenais pas en faire.

Sans plus attendre, je pénétrai dans le parc attrapant le bras de mon ami pour qu’il me suive. Très vite j’arrivais à destination de ses fameux éléphants. Ils étaient roses, bleus, jaunes, un peu toutes les couleurs et c’était très féériques. « Des n’éléphants !! » Je lui montrais à l’aide de mes bras comme si je présentais un grand projet alors que ce n’était pas grand chose en soit., mais pour mon âme d’enfant, ça l’était.

Un vrai gamin. Voilà ce qu’était Anthony. Et pourtant on ne pouvait pas dire qu’Abel ne l’appréciait pas. Au contraire. Mais il devait bien avouer en le regardant manger qu’il avait l’air d’un enfant quand il mangeait. En tout cas il avait l’air d’aimer ses muffins. Il commença d’abord par leur parler, ce que soit-dit en passant Abel faisait presque toujours quand il avait de la nourriture devant les yeux. Il lui arrivait de fait de longs monologues devant une rare boulangerie en voyant telle ou telle pâtisserie. Alors cela ne le choquait pas plus que ça de voir le jeune homme parlementer avec ses muffins, du moins il essayait tant bien que mal de deviner des réponses qui ne viendraient jamais. C’était bien marrant, il avait l’impression d’avoir un miroir devant lui quand il partait dans ses délires. Sacré Anthony ! Il en empoigna un et l’avala quasiment tout rond. Là encore rien de choquant et pourtant autour d’eux, ceux qui ne s’occupaient pas que de leur oignons paraissaient outrés d’une telle attitude.

Il essaya d’argumenter sur le fait qu’il gagnait très bien sa vie, mais Abel n’était pas dupe. Il ne savait pas comment il se débrouillait mais Anthony ne semblait jamais avoir un sou en poche et pourtant il tenait la route. Il ne lui demandait pas et ne le ferait pas. Mais il était bien conscient qu’à moins qu’il ait un très généreux donateur ou qu’il soit l’héritier d’une fortune colossale, à un moment où un autre l’argent viendrait à lui manquer sérieusement. Bien que cela était très généralement le cas avec Anthony. Cela ne gênait pas le français mais il voulait qu’il se bouge un peu, qu’il fasse quelque chose de sa vie. Bon apparemment ça ne serait pas pour aujourd’hui. De toute façon il était trop occupé à manger les muffins et Abel trop occupé à essayer de savoir où est-ce qu’il l’emmenait.

La réponse vint une heure après lorsque le train s’arrêta. Anthony n’avait pas voulu lui en dire plus. Le français n’avait d’abord pas reconnu le terrain. Il savait qu’ils étaient un peu en dehors de la ville. Puis plusieurs choses ne le trompèrent pas et juste avant d’arriver à destination il comprit. Ils étaient au parc d’attractions. La rumeur battait son plein et le bruit des festivités leur parvint vite aux oreilles au fur et à mesure qu’ils avançaient vers l’entrée. D’abord une vingtaine, puis une quarantaine et puis bientôt plus de 100 ils se dirigeaient comme un seul homme, mût par diverses raisons pour franchir le seuil du parc. Cela lui ôta un doute, mais Abel ne voyait toujours pas le rapport avec les éléphants. Quelle était cette énigme bon sang ?? Il voulait encore questionner Anthony parce qu’il n’était pas patient. Mais s’ils étaient là pour le parc d’attraction la réponse viendrait assez vite. Il pensa à sortir son portefeuille pour payer leurs entrées, mais avant qu’il n’ait pu esquisser le geste son ami l’emmena vers les guichets, paya leurs places à tous les deux et le prenant par le bras l’emmena dans l’enceinte du parc. Abel redevint alors lui aussi un gamin. Partout la féerique du manège l’emportait. Partout ça sentait la barbe à papa et les sucreries ; partout ça criait et ça chantonnait. Non vraiment il avait toujours appréciait l’ambiance des parc d’attractions. On pouvait avoir 10 ou 60ans lorsqu’on se trouvait là on était tous des enfants. Bercés par la magie. La pure magie. Il regarda Anthony qui l’entraînait encore et lorsqu’il s’arrêta il lui désigna un stand en lui disant que les éléphants se trouvaient-là.

Un grand sourire s’installa sur le visage du français. Il comprenait à présent. Au-dessus du stand en forma de roulotte, flottaient une dizaines de ballons gonflés à l’hélium et parmi la masse on distinguait des éléphants roses. Il fut prit d’un rire et à son tour il prit Anthony par le bras et l’emmena jusqu’au stand où il prit deux ballons éléphant. Ils se comprenaient très bien finalement.

« Non mais alors toi ! » dit-il en riant encore.

« Voilà on a nos éléphants. On continue le safari ? Puisqu’on est là autant sauter sur quelques manèges pour s’envoler. Qu’est-ce que tu en penses ? » Abel n’attendit pas sa réponse pour l’emmener au cœur du parc.

Le fait qu’il ne s’attende pas à voir où je venais en venir me faisait plaisir. Il avait toujours eut l’habitude d’anticiper mes actes vu qu’on était la plupart du temps sur la même longueur d’onde, mais cette fois-ci, la surprise était réussite. Une fois dans le parc d’attraction il se demandait encore et encore où je venais en venir et pourquoi je l’avais emmené ici, car ce n’était pas franchement un endroit où on pouvait trouver des éléphants dans chaque coin et pourtant, moi j’y étais arrivé. Il c’était sans doute imaginé un zoo où je ne sais quoi d’autre encore, je ne serais vous dires vu que je ne me trouvais pas dans sa tête, mais je savais très bien que l’idée d’un safari dans un parc d’attraction ne lui était JAMAIS venue en tête. Un sourire de victoire c’était dessiné sur mes lèvres pendant que je l’emmenais vers le lieu fatidique. Bientôt il saura de quoi je voulais lui parler depuis il y a déjà plus d’une heure. J’avais eut beaucoup de mal à ne rien lui dire durant le trajet et c’est pour cette raison que je l’avais remercier pour ces muffins, car je pouvais au moins occuper ma bouche pendant tout le trajet. Chose qui était bien difficile, car même la bouche pleine, j’arrivais à parler. Ce n’était pas forcément très poli et très glamour, mais j’y arrivais quand même. Comme on dit souvent, quand on veut, on peut !

En tout cas, nous étions enfin arriver à destination et à sa phrase, un grand sourire enfantin se dessina sur mes lèvres. Je savais bien que j’étais irrécupérable et qu’il était à présent trop tard pour me changer, mais figurez vous que j’étais fier d’être moi. Mais j’étais encore plus fier d’avoir dans ma main gauche, un ballon éléphant que j’avais tant convoité. Je le regardais yeux dans les yeux, attendri par son mignon petit visage. C’est bon, je venais de régresser de dix ans, si ce n’était pas déjà fait. C’est la voix de mon ami qui eut le don de me réveiller sinon je serais bien resté comme ça a regarder ce drôle de petit ballon durant des heures espérant qu’il engage la conversation. Oui, avec moi, les objets les plus farfelus pouvaient penser, parler et jouer avec moi, mais il y a un moment ou un autre où je devais me raisonner, car ce n’était que des objets. À cette pensée je fus extrêmement déçu, mais la suite de notre safari me remontra sûrement le moral. « Merci » Dis-je en tenant le ballon qu’il m’avait donné. J’esquivais alors un petit sourire décrochant mon regard du ballon en hélium que je comptais pas lâcher de peur qu’il s’envole pour toujours. Je sentais déjà un grand lien fraternel s’unir entre l’éléphant et moi et je savais d’ors et déjà que le jour où il venait à éclater, je pleurais sûrement toutes les larmes de mon corps.

Très vite, je me retrouvais au centre du parc sans trop comprendre pourquoi. Avais-je transplaner sans même m’en rendre compte ? Je regardais trop les films de science-fiction et devais là aussi, me résoudre à l’idée que toutes ses inventions n’existaient pas vraiment. Vraiment, je ne comprenais pas pourquoi on inventait toutes ces petites choses si c’était pour au final nous décevoir à l’idée que ce n’était que des bêtises. C’est comme le père noël, on nous invente cette histoire là pour mieux nous faire chialer par la suite. Vraiment, tous des sadiques ces gens là. Enfin, ce n’était pas vraiment le sujet principal et je m’égarais une fois de plus dans mes pensées. Passant du point A au point Z et du point C au point J, vraiment, aucune logique dans tout ce que je racontais. Je gardais mes pensées pour moi pour ne pas perdre les gens avec qui je discutais. J’avais déjà essayer une fois et la personne avait très vite perdu le bout du fil. Depuis, j’avais lâché l’affaire. Je suis un incompris dans ce monde de brut, mais encore heureux que j’avais mon fameux acolyte pour me tenir compagnie dans mes plus grands et mes plus farfelus délires. D’ailleurs, quand c’était à son tour d’en avoir, je faisais de même.

Au centre du parc, je regardais autour de moi et finissais par me diriger vers une carte pour voir par où nous allions nous diriger. « Dans des manèges à eau tu crois qu’il y a des loutres, des phoques ou des pingouins ? » Lui demandais-je pas sûr de moi. « C’est bien des animaux qui viennent de safari non ? » Cette fois-ci encore, je n’étais pas sûr de mon coup. Me faire passer pour un inculte était loin de me faire peur surtout devant lui. Et puis de toute façon, même si je venais à me tromper, je n’en mourrais pas, au moins je mourrais moins bête. Mon doigt sur la carte en cherchant un quelconque manège, j’attendais avec impatience sa réponse. Et si elle venait à être négative, j’irais sans doute quand même y jeter un coup d’œil bien décidé pourquoi pas, à essayer toutes les attractions possibles et inimaginables.