Une seconde rencontre ▬ Abel & Casey

Abel sursauta. Se réveilla. Attrapa son fichu réveil d’une main et l’éteignit avec difficulté. Il cligna plusieurs fois des paupières avant de pouvoir garder les yeux ouverts. Il fallait dire qu’il c’était couché extrêmement tard à cause d’un travail de recherche effectué avec son mentor le Professeur Melinda Gordon. Elle l’avait gardé avec lui toute la nuit. Il était rentré chez lui vers les 3h du matin le cerveau complètement à l’ouest et déconnecté. Il regarda l’heure et cela finit de le réveiller. Il avait un TP de biologie avancée qui allait commencer dans une demi-heure. Il sauta du lit et finissant d’enlever le dernier rempart à sa nudité il se glissa sous la douche et se lava prestement. Courant dans sa chambre en terminant de se sécher il prit les premières fringues qui vinrent à lui : chemise blanche, gilet anthracite et pantalon gris. Il s’offrit le temps de passer une cravate fine autour du col mais ne se laissa pas le temps de bien la fixer. Enfilant ses chaussettes à cloche-pied sous le regard médusé et intrigué de son chat Yang, le jeune homme se dirigea vers la cuisine. Même en retard il était inconcevable pour lui de partir sans rien avoir dans le ventre. Il cala un pain au chocolat à moitié dans sa bouche et avant de l’avoir complètement fini il en prit un deuxième qu’il prit entre les dents. Non ne cherchez pas à le comprendre, la nourriture c’était toute sa vie.

Il mit de l’eau pour Yang, ainsi que des croquettes, enfila des chaussures blanches, prit ses clés et son sac, ouvrit la porte, la claqua, pesta et se tapa le front parce qu’il avait oublié son casque et sa veste, rouvrit la porte se cogna le genou dans un angle, grogna, prit sa veste et son casqua, claqua la porte et dévala les escaliers. Abel poussa un soupir en enfourchant sa moto. Il souffla quelques secondes puis démarra en trombe. Son fameux concierge, un petit vieux sympathique mais prolixe n’eut que le temps de lever la main pour lui souhaiter une bonne journée. Mais le jeune homme ne le vit pas. Il fonçait à vive allure. Heureusement qu’en moto le campus n’était pas loin de chez lui, il n’imaginait même pas arriver à ce cours. Surtout avec ce professeur. Il était acariâtre et antipathique et ne tolérait rien ni personne. Avec lui un retard équivalait à un abandon. N’eût été l’appui de Mme Gordon Abel aurait déjà été viré de ce TP. Il pensa qu’il faudrait qu’il parle à cette femme des horaires qu’elle lui faisait subir parfois. Et il s’en voulait parce que d’habitude il se réveillait toujours à temps. Il freina en tournant à gauche et fila. Cinq minutes plus tard il apercevait déjà les bâtiments de l’université. Il se gara vite fait bien et en enlevant son casque il se mit à marcher rapidement puis à courir en calant son sac sous son bras. A sa montre il n’avait plus que deux minutes pour atteindre la salle de cours. Pas le temps de saluer des connaissances il grimpa les escaliers, slaloma entre les élèves et posa la main sur la porte de ladite salle de TP tandis que celle-ci se refermer. Il offrit un large sourire au professeur excédé, lui montra son cadran afin de lui prouver qu’il lui restait 20 secondes pour entrer en classe et passa la porte.

L’acariâtre pesta dans sa moustache et ferma la porte en prenant la parole.

« Aujourd’hui, travaux pratiques, vous effectuerez les exercices que je vais distribuer par groupe de deux que vous me remettrez à la fin du cours ! »

Abel ne l’écoutait que d’une oreille. Il cherchait une place. Les premiers rangs étaient déjà occupés et il ne restait finalement que peu de sièges libres. Il avança, saluant discrètement les personnes qu’il connaissait bien. Regardant au fond son regard fut attiré. Par quoi ? Non, plutôt par qui. Cette fille seule. Abel l’avait déjà croisé. Sa mémoire s’activa, de toute façon le réveil avait été brutal autant continuer sur la lancée. Elle chercha dans les rayons de son esprit la rencontre avec cette personne. Casey. Oui. Il se souvenait maintenant. Et un sourire espiègle s’étala sur son visage fraîchement sorti du lit. D’une démarche lente il prit un pas plus assuré et rapide et contourna quelques tables avant de finalement venir poser son casque sur la grande table dédiée aux travaux pratiques. Il la regarda, regarda à droite puis furtivement à gauche et en chuchotant et posant la main contre sa bouche pour mimer la confidence il lui dit :

« Heu … personne m’a suivi c’est bon ? Je peux m’asseoir ? »

Abel garda cette position le temps de la blague, puis lui offrant un clin d’œil il s’assit sur la chaise haute. Il souffla une nouvelle fois, pour prendre du courage et se frotta les yeux. Il avait posé son sac au pied de la table. Puis il se tourna vers Casey.

« Comment ca va la parano ? »

Il était sans gêne. Voilà ce qu’il était. Abel était toujours le premier pour dire ce qu’il pensait quand il le pensait. Souvent, même la plupart du temps cela lui portait préjudice. Il avait ce côté enfantin cruel de pouvoir sortir tout ce qui lui passait par la tête sans y réfléchir. Il ne prenait pas le temps d’analyser chaque mot qu’il voulait prononcer. Il était surtout du genre à penser que la franchise valait tous les maux du monde et que même s’il était doté de ce trait de caractère il n’empêchait que le jeune homme savait le tempérer après coup. En effet, s’il avait pris le parti de ne jamais brider ses pensées, il savait les expliquer et les argumenter afin que leur impact soit moindre. Ainsi lorsqu’il taquinait Casey sur sa paranoïa c’était uniquement dans le but e la faire rire et de détendre l’atmosphère. Même s’ils ne se connaissaient à vrai dire que très peu cela suffisait à Abel pour savoir ce qu’il pouvait se permettre ou non. La charrier faisait partie des choses qu’il pensait pouvoir se permettre. Il était très difficile pour lui de ne pas prendre la vie du bon côté. Il voyait en chaque occasion, chaque fait, un moment de rire de joie et d’amusement. Se prenant au sérieux uniquement lorsqu’il le fallait, il avait réussi à faire passer l’humour au rang d’art de vivre. Et vu ce qu’il lui avait sorti lors de cette rencontre mémorable elle ne pouvait qu’en rire.
Il avait décidé ce jour-là d’aller acheter du pain. Après tout il était français et un français sans pain n’était pas un vrai français. Mais les bonnes boulangeries, et à vrai dire, les boulangeries tout court, ne courraient pas les rues à L.A. La seule potable se trouvait dans le quartier le plus paumé et mal famée de la ville. Mais son estomac le guidait n’importe où pour de la bonne nourriture. Et puis c’était un colosse qui ne risquait pas grand-chose à part se prendre un poteau en regardant pas où il mettait les pieds. Il avait fallu que ce jour son chemin croisa celui de la belle jeune femme. Il ne la remarqua que lorsqu’elle lui sauta littéralement dessus en essayant de lui asséner des coups. Mais elle s’y était tellement mal pris que le jeune homme eu un vrai fou rire et il avait fallu qu’il se calme pour s’excuser et se moquer d’elle gentiment. Déjà ses coups ne portaient pas loin, sa garde était mauvaise, et puis elle ne portait pas l’intention dans son attitude. Abel prit même le temps, en pleine rue de lui expliquer tout ça. Ils ne se connaissaient pas alors mais pourtant il lui donnait presque un cours de self défense. Casey s’excusa en lui proposant un verre. Autour de celui-ci il comprit un peu son attitude. Une fille un peu parano qui vivait dans un quartier sournois. Cela avait de quoi faire un bon scénario de film dramatique. Il prit le parti de rassurer un peu plus cette jeune femme en lui déclarant que de toute façon il ne courrait pas après les filles. Il sentit imperceptiblement son attitude changer et le reste de la discussion fut plus détendue, ils parlèrent un peu d’eux.
« J’ai comme l’impression que je vais encore en entendre parler longtemps… »

Il entendit ses paroles pendant qu’il s’installait et lâcha un petit rire. Un peu mon n’veu ! Il n’allait pas s’arrêter de sitôt de la taquiner avec ça. Il y avait tout un pan de vannes sur la paranoïa qui s’ouvrait à lui, il n’allait pas rater ce train. Oh que non !

« Tu sais que je ne suis pas tout le temps parano pas vrai ? Enfin je veux dire ça m’arrive, de temps en temps ou presque quotidiennement mais en fait, je me fais suivre pour ça ! » « Enfin, ça va aujourd’hui, personne n’a essayé de m’agresser, à part ce cher professeur qui m’a refusé à son cours précédant, c’est pourquoi tu as la chance de me retrouver ici ! » Il lâcha un nouveau rire et quelques têtes se tournèrent vers lui. Il fallait qu’il apprenne à rire plus discrètement. Mais il ne pouvait s’en empêcher. Son rire était sonore et très communicatif. Mais histoire de ne pas abuser de la patience de ce professeur il avait fait un effort pour ne pas rire trop fort. Il calma ses décibels et se tourna vers Casey. Purée ce qu’elle était drôle ! Il posa même la main devant sa bouche pour empêcher un son plus large d’en sortir. Si elle continuer il allait exploser. Pour sa défense on pouvait dire que le français était très bon public et qu’un rien le faisait partir en live. Alors si elle était aussi second degré que lui, ça promettait de bonnes et franches parties de rigolade ! Il se tourna vers elle et allait répliquer au top de la vanne mais le vieux professeur arriva vers eux et s’arrêta un instant, semblant considérer ces deux fortes têtes qui pensaient que l’heure n’était là que pour faire joli. Il leur posa tout de même l’exercice sur le coin de la table et avec un regard plein de mépris et de fierté s’éloigna. Abel lui fit une grimace et se tourna à nouveau vers la jeune femme qui parlait à nouveau. Et qui le taquiner. Il l’observa la langue entre les dents.

« Haha ! Mademoiselle flip total a mangé un clown ce matin ? » dit-il en lui souriant tout autant. « Ouai la nuit fut longue mais je crois que la tienne aussi. T’as vu comment t’es débraillée ? Non sérieux fait gaffe on pourrait t’arrêter pour atteinte à la morale ! » Abel jeta un œil à sa cravate et tenta de l’arranger. Sans grand succès. Il haussa les épaules en prenant la feuille d’exercice. Il commença à y jeter un coup d’œil. Bon comme il s’était assis à côté d’elle, ils feraient équipe aujourd’hui. Un bon binôme. Mais il allait avoir du mal à se concentrer avec celle-là. Le jeune homme avait déjà du mal à ne pas éclater de rire alors travailler avec elle allait relever du défi.

« Ah et je te préviens immédiatement, en plus d’être une parano notoire, j’ai un niveau assez moyen en biologie alors c’est peut-être le moment de te rétracter et t’asseoir à côté de quelqu’un qui ne ruinera pas ta moyenne du semestre… » « … non, en fait je pense que c’est trop tard, ça t’apprendra à te moquer de moi de toute façon ! » Il mima un malaise et fit mine de chercher un autre binôme puis lui sourit encore.

« Tu m’as piégée avoue ! Tout ça c’était orchestré depuis le début j’en suis sûr maintenant ! Pour qui tu travailles ?! » dit-il, le visage riant contrastant avec ces paroles bien paranoïaques. Encore une vanne sur leur rencontre. Décidément cela laissait vraiment d’énorme possibilité de blagues. Il s’en rendait compte et sentait que Casey finirait par lui mettre un microscope sur la tête. Il joint les mains en signe de prière et regarda le plafond le visage implorant.

« Je vous en supplie Bouddha, Shiva, Jésus, si vous me mettez avec quelqu’un d’autre je deviendrais sage et gentil, et poli et bien élevé … » Il poussa un soupir, comme s’il était résigné et regarda Casey. En lui touchant la tête d’un geste qui se voulait amical et affectueux il dit :
« Je plaisante mistinguette ! Bon je vais aller chercher le plateau, les ustensiles, tu te charges du microscope et des lunettes ? » Se faisant et joignant le geste à la parole, dans le brouhaha général, Abel se leva et alla jusqu’aux paillasses pour prendre les outils mis à leur disposition pour les travaux pratiques. Il prit plusieurs choses qui leur serviraient puis revint à leur table.
« Et puis t’inquiète pas, moi je suis plutôt bon ca fera une moyenne ! » Il regarda la feuille d’exercice, « Enfin … je crois ! Ca à l’air chaud son truc là, mais bon en pratiquant toutes les étapes on va y arriver. Ou tout foirer. Au choix. Et pas de commentaire la nulle ! Dis-moi plutôt si tu veux que je te raccompagne chez toi ce soir ? » Abel lui avait déjà dit lors de leur première rencontre que cela ne le gênait pas de la raccompagner chez elle si cela pouvait la rassurer. Ca lui permettait d’aller chercher du pain en même temps. Il cala les outils et nota une première formule.

Elle prit la cravate en main comme pour la lui remettre en place. Et se figea dans un mince sursaut.
Elle reçut la petite tape amicale sur la tête. Et se figea.
Abel n’en fut pas vraiment étonné mais trop fin sur ce coup-là ne se permit pas de réagir. La taquiner sur sa paranoïa était une chose, mais rire sur sa crainte des hommes en était une autre. Non, elle ne s’était pas épancher sur le problème. Le français avait déduit tout ça de ce qu’il en avait vu, et plutôt intelligent et analyste il comprit vite ce qui n’allait pas. Casey ne supportait pas le contact les hommes. Certes à leur première rencontre elle avait simplement pensé qu’il l’a suivait, mais en prenant un verre avec elle plusieurs détails avaient attiré son attention. Le frôlement de leur bras en passant la porte du café, la chaise tirée pour elle, leurs mains qui faillirent se toucher en attrapant le sucre. Et maintenant ces infimes mouvements de retenue et de recul. Il ne savait pas ce qui avait pu se passer dans sa vie pour qu’elle ait cette attitude et il ne le lui demanderait pas car après tout c’était sa vie prive et même s’il était curieux de nature il préférait encore que ça soit elle qui lui en parle. Il fit un signe de la tête lorsqu’elle s’excusa comme pour lui dire que ce n’était pas grave, que chacun avait droit à son jardin secret sans craindre d’être jugé par les autres. Oui, Abel pouvait être sérieux et doué de manières quand il le voulait, ou surtout quand la situation l’exigeait.

C’était la deuxième chose étonnante chez Casey. Malgré ses tics presque involontaires, comme des réactions réflexes du corps, elle était extrêmement pétillante, joviale et taquine avec Abel. Elle faisait volontiers de l’autodérision, le charriait aisément et avait un très bon sens de la répartie. Comme maintenant il ne pouvait s’empêcher de rire à ses blagues parce qu’elles étaient drôles (mais aussi parce qu’il riait à presque tout). Ses mimiques répondaient aux siennes. Ces deux-là étaient deux bouts en train à n’en pas douter. Ils se connaissaient à peine et pourtant ils étaient déjà si familiers. Etait-ce dû à leur rencontre un peu spéciale ? Au fait qu’elle semblait l’appréciait même s’il était du genre masculin ? Ou tout simplement parce qu’avec lui peu de gens pouvaient rester sérieux ? C’était sans doute un peu des trois. Elle avait ce je ne sais quoi qui lui donnait le sourire. Entre eux pas de tensions sexuelles. C’était aussi peut-être une valeur à prendre en compte dans cette entente. En tout cas Casey avait toujours une réponse piquante à lui fournir et cela lui plaisait.

Après avoir disposé les affaires qui leur serviraient pour le TP, il avait pris la feuille et avait commencé à noter diverses formules et signes pour le guider dans ses réflexions mais aussi aider Casey à mieux y voir. Le fait qu’elle lui ait avoué être une quiche en biologie ne lui posait aucun problème, et même s’il c’était prétendu meilleur qu’elle, il n’en menait pas vraiment large. Le fait qu’il donnait des heures de tutorat expliquait peut-être son côté « professeur » sans qu’il soit pourtant autant lourd avec des explications complexes et un air hautain. Il sentit la présence de la jeune femme qui lisait la feuille à côté de son épaule mais n’osa pas bougé de peur de la faire reculer. « Ah attends, je connais la réponse à la première question, c’est de la théorie et j’ai avalé le bouquin de bio la semaine dernière ! Et me dis pas que tu la connais aussi, tes connaissances seront assez mises en avant par la suite, laisses moi avoir l’impression de savoir quelque chose ! » Elle lui arracha vivement la feuille des mains. Il fut surpris et se tourna vivement vers elle, posant la main sur le cœur et miment l’essoufflement. « Non mais ça va pas non ?? Et si j’avais été cardiaque ? Pff tu n’as aucune pitié ! Pas étonnant que tu sois parano, tu as dû faire peur à des gens et maintenant ils se vengent c’est normal. » Là encore il fit une grimace rigolote mais la jeune femme était trop occupée à gribouiller des chiffres sur la feuille d’exercice. Il posa le coude sur la table, puis la tête dans sa main et la regarda gratter la tête penchée. Il souriait. Parce qu’encore une fois elle venait de le faire rire. Décidément, ce cours allait mettre le peu de sérieux qu’il avait à rude épreuve. Il n’arrivait pas à se concentrer longtemps en temps normal (on se demande d’ailleurs comment il en est arrivé jusque-là) mais alors là avec elle dans les pattes il allait sûrement passer le plus clair du temps à rigoler. Ce qui au fond ne le dérangeait vraiment pas. En tout cas, il était bien réveillé à présent et se sentait la force d’attaquer la journée. Ça tombait bien puisque Casey lui rendait la feuille.

« Maintenant, tu peux me montrer de quoi tu es capable ou pas ! »
« Aller laisse faire l’artiste. Et enlève ces lunettes sur ta tête on va te prendre pour une starlette. J’sais bien qu’on est à L.A mais quand même…. » dit-il en secouant la tête de droite à gauche d’un air désolé pour elle. Il prit donc la feuille, souriant sous cape pour ne pas lui montrer. Mais il avait du mal à se contenir et lâcha encore un petit rire étouffé. Il se mit debout et posa la feuille. Il attrapa la boîte d’échantillons qu’ils devaient analyser, prit l’u d’eux avec une pince, le posa sur le rectangle de verre et y apposa une goutte prélevé dans un flacon. Il posa le tout sur le microscope. Il posa la main sur la molette d’ajustement et se tourna vers Casey sans achever son geste.

« Hum d’accord c’est toi qui voit. De toute façon je devais passer prendre du pain vers chez toi. Tu sais cette boulangerie française. Enfin bon je prendrais un autre chemin histoire que tu ne me tombes pas dessus encore une fois haha ! »l lui tira la langue et riva ses yeux sur le microscope. Abel ne lui en voulait pas d’avoir dit non. Il était chevalier, mais si elle préférait rentrer seule c’était son choix. Ceci dit maintenant qu’il l’avait rencontré il ne pourrait s’empêcher d’avoir une inquiétude lorsqu’elle rentrerait chez elle. Le jeune homme était assez protecteur envers ceux qu’il considérait un tant soit peu. Il nota une formule puis jura. Il avait noté la mauvaise.
« No coment. » dit-il en jetant un coup d’œil à Casey.

« Va falloir que tu joues de tes charmes ma belle. Je crains qu’on bute sur une ou deux questions. Tu ne voudrais pas être gentille et aller titiller la moustache de ce vieux prince ? Ouai enfin … mauvaise idée. Il risquerait d’aimer ça ! Dis-moi plutôt ce qui t’a amené à être en retard. » lui dit-il à voix basse pendant qu’un léger silence se faisait ressentir. La plupart des étudiants avaient mis les nez dans leurs travaux et pour l’instant l’ambiance était un brin studieuse.

Et finalement elle accepta tacitement qu’il la raccompagne chez elle. Du moins qu’ils fassent un bout de chemin ensemble. Cela plut à Abel qui lui sourit. A vrai dire il n’avait pas voulu lui forcer la main, il ne voulait pas qu’elle se braque. Il s’estimait heureux qu’elle prenne autant de liberté en sa présence et même s’il ne se donnait aucun mérite d’une quelconque action sur son changement il devait bien avoué qu’elle ne semblait pas forcée à faire cet effort d’être aussi familière avec lui. Il avait donc énoncé son programme après les cours à savoir passer chercher du pain parce qu’il ne pouvait pas vivre sans, et si elle n’avait pas eu la charmante et drôle attention de lui dire qu’ils pourraient faire un bout de chemin ensemble pour qu’il ne se perde pas il la remercia tout de même d’un hochement de la tête. Son sens de l’orientation laissait parfois à désirer même si en l’occurrence il avait bien mémorisé le trajet jusqu’à la boulangerie. Bref sur ces entrefaites Abel eu l’occasion de se dire que Casey était une fille bien et que malgré son léger « blocage » avec lui elle était naturelle, du moins il le pensait dans toute sa naïveté, même si sa sensibilité lui faisait penser ça très sincèrement. Après tout même s’il s’était mis à côté d’elle pour le TP, si elle n’avait pas voulu travailler avec un garçon elle aurait pu trouver un binôme féminin. Il préférait croire à son charme et son charisme irrésistibles.
Ils continuaient de travailler cependant, et elle était d’une précieuse aide au final, malgré le fait qu’elle se dise très moyenne en biologie. Elle avait quand même répondu à deux questions et semblait parfaitement à l’aise avec les manipulations. Peut-être que la pratique lui était plus difficile, il ne pouvait pas en juger dès à présent. Pendant qu’il regardait et noter divers choses elle s’occupait de préparer les lames, les échantillons ainsi que le reste du matériel nécessaire. Ils formaient en fait une bonne équipe et se complétaient plutôt bien. Lorsqu’il lui fit la blague sur le professeur elle se redressa immédiatement pour tourner la tête vers lui manquant de peu de se perforer la joue avec le microscope, ce qui tira un petit rire au jeune homme.

« A toi l’honneur ! »
« Non mais si je m’y mets il risquerait d’avoir un orgasme ce vieux croûton ! » dit-il en faisant une grimace comme s’il allait rendre son petit déjeuner. Puis il sourit à nouveau. Abel n’avait aucun tabou, sur aucuns sujets. Il tournait tout cela en dérision, la sexualité, l’amour, la religion. Cultivé il pouvait se le permettre. Ce qu’il était lui n’échappait pas à la règle. Il assumait pleinement tous ses choix et ses actions et même si sa sexualité ne regardait que lui, il n’avait aucun problème avec ça. Au contraire c’était comme ça qu’il avait pu être ce qu’il était, sûr de lui et de ses principes. Il était gay et alors ? Ce n’était pas comme s’il avait une maladie incurable. Quoiqu’en fait si, il en avait une, mais ne risquait pas d’en mourir. Enfin pas depuis que son défunt père avait trouvé un remède. Mais ça c’était une autre historie et il s’égarait dans ses pensées. Il n’avait donc aucun honte à plaisanter sur la sexualité. A leurs âges ils n’avaient de toute façon pas à avoir de réserves sur de telles notions.
Il reprit pied dans le réel lorsqu’elle lui raconta pourquoi elle avait été recalé au cours précédent et qu’elle semblait si fatiguée. Il comprenait mieux à présent. Elle avait le sommeil léger et le tapage nocturne qui régnait constamment dans son quartier ne l’y aidait pas. Enfin sommeil léger, sommeil léger, elle n’avait tout de même pas entendu son réveil alors bon, niveau légèreté elle repassait. Et cela ferai l’objet d’une nouvelle vanne à n’en pas douter. Abel avait de la chance d’habiter dans un quartier calme, plutôt bien fréquenté et aisé. Il n’avait rien demandé mais devait avouer que son sommeil n’en pâtissait pas. Il avait un super concierge, qui même pour son âgé assurait un service et une tranquillité remarquables. Il était du genre bavard et ne ratait pas une occasion de papoter avec les résidents et surtout Abel qu’il avait pris en affection. Il aimait beaucoup la France, il y était restait un peu après la Seconde Guerre Mondiale et avait développé de sacrés liens fraternels avec les français. Il aimait bien discuter avec le jeune homme et Abel le lui rendait bien. Bon parfois il esquivait gentiment histoire de pouvoir vaquer à ses occupations mais la plupart du temps il restait quelques bonnes minutes pour lui racontait sa journée.

« Et toi, c’est quoi ton excuse pour être débraillé ? T'as aussi été très proche du renvoi de cours si mes souvenirs sont bons ? »

« Hein quoi ? » Il secoua la tête perdu dans ses pensées. « Ah oui, oui ! Mais en fait il ne peut pas vraiment le refuser l’entrée. Vois-tu si j’ai cet air débraillé, mais bon en même temps t’as vu ta tête ? C’est parce que je suis l’assistant d’une chercheuse, Mme Gordon qui dirige le département de médecine d’ailleurs, et qu’elle m’a retenu prisonnier, afin qu’on boucle un dossier. J’ai dû rentrer chez moi vers 3 heures du matin. Je me suis écroulé comme une masse et j’ai entendu mon réveil mais pas assez vite pour être à l’heure. Et donc pour terminer cette petite histoire, M. Rupert est comme qui dirait un fervent admirateur de Mme Gordon. Une fois elle lui a même remonté les bretelles, enfin façon de parler, parce qu’il m’avait refusé en cours, et ce n’était pas ma faute en plus ! C’était pas beau à voir, il avait l’air encore plus déconfit qu’aujourd’hui ! Si si je t’assure c’est possible ! Bref, maintenant il me déteste encore plus mais il ne peut rien me faire. » dit-il en regardant le professeur et en lui faisant un mince signe de la main pendant qu’il ne les regardait pas.

Il n’avait pas demandé à avoir des faveurs, mais Mme Gordon l’appréciait beaucoup malgré son air pincé à la Miverva Mac Gonagall. Elle lorsqu’elle pouvait l’aider elle le faisait en coulisse. Abel reprit son souffle tandis que Casey reprenait la feuille pour noter la réponse à la question 4.

« Bah tu vois t’es pas si bête enfin … Prend pas la grosse tête non plus ! »
Il attrapa une des lames préparée par la belle et l’examina. Il régla le microscope, m=posa une autre lame, revint sur la première puis nota enfin une phrase.

« Tu peux me passer la pipette s’il te plait ? » dit-il en tendant la main vers elle sans la regarder. Il fronçait les sourcils en essayant de distinguer quelque chose sur la lame qu’il observait. Puis quelques secondes plus tard il leva la tête vers elle.

« Tu peux voir si tu reconnais les bonnes structures moléculaires ? J’ai les yeux qui fatiguent. » avoua t-il en baillant sans retenue. Il écarta les bras en prenant soin de pousser gentiment Casey au passage. Son dos craqua et il poussa un soupir.
« J’ai faim. »

Casey se laissait aller à une conversation plus personnelle et Abel appréciait la confiance qu’elle pouvait placer en lui. Ils ne se connaissaient que très peu si on pouvait dire ça et pourtant ils s’entendaient plutôt bien, malgré leur caractère. Lui si extraverti, elle assez timide. Il ne savait pas si c’était naturel ou si c’était une carapace, de toute façon il ne l’a jugeait pas là-dessus. Il ne la jugeait pas tout court en fait. Il pensait au mot timide parce que plusieurs fois il remarqua des réactions chez elle : rouge aux joues, mouvement de retenue. Mais en même temps Casey faisait de l’humour, pratiquait l’autodérision, et le taillait aisément. Ainsi il parlait plus de son attitude que de ses paroles. En tout cas rien de tout cela ne le dérangeait au contraire. Il pouvait dire qu’il passait un bon moment et ce malgré l’intitulé du cours et le TP. Il rit lorsqu’elle essaya de le pousser comme il l’avait facilement fait quelques instants auparavant. Le jeune homme la toisa du regard. Abel était un genre de colosse, plutôt grand, même au-dessus de la moyenne et finement musclé. Il ne s’en donnait aucun mérite et n’était pas du genre à en jouer. A vrai dire, il était plutôt fier de la discipline martiale qu’il pratiquait depuis presque 10 ans et ça plus que tout autre chose lui avait donné cette maîtrise de son corps. Casey aurait pu le faire bouger, mais comme il lui avait déjà fait remarquer la première fois, elle si prenait mal. Mais la plupart des gens n’avaient pas conscience de leur capacité. Elle exerçait une force horizontale et à poids inégal elle ne pourrait pas le faire bouger. Bref il se perdait dans ses pensées et entrouvrit la bouche lorsqu’elle lui interdit de faire un commentaire. L’envie lui en brûlait les lèvres, mais bizarrement il se retint. Partie remise.

Quand il finit de se plaindre sur sa faim elle sortit une pique. Abel avait compris qu’elle ne lui en voulait pas d’avoir ce petit privilège face au professeur et à vrai dire il se fichait bien de l’avoir ou non. Après tout il n’avait jamais rien demandé de tel à Mme Gordon et même si des rumeurs couraient à ce sujet, le jeune homme savait qu’il n’avait rien à se reprocher, que son ambition n’était pas mal placée et que tout ce qu’il faisait il ne le devait qu’à lui-même. Si son boss se permettait de lui faciliter certaines choses dans l’ombre il n’en savait rien et ne jouait certainement pas là-dessus pour réussir ou s’en sortir. Il sourit donc à Casey et regarda le professeur en biais. Un petit sourire malin se dessina bien vite sur ses lèvres. Discrètement il attrapa son sac par terre et le posa sur sa jambe. Il fit signe à Casey d’approcher et l’ouvrit. A l’intérieur se trouvaient plus de petits gâteaux que de cours. Madeleines, sucreries, beignets sous vide, bref un bel échantillon. Le jeune homme était un ventre sur pattes et la nourriture passait presque avant tout le reste. Il aimait manger et ne s’en privait pas surtout pas pour les bonnes choses. Ainsi il avait toujours sur lui quelques trucs à grignoter parce qu’il avait toujours un petit creux. Il avait pourtant déjeuné, mais à l’arrache et avait quand même faim. Parfois en riant il sortait une excuse bidon, qu’il chuchota à Casey : « Je suis un garçon en pleine croissance, j’ai le droit ! » Piètre excuse en effet. Mais il ne pouvait pas s’en empêcher. Vu sa masse musculaire, son hyperactivité il devait beaucoup manger c’était un fait. Il posa deux madeleines sur la table. Même si le professeur tolérait ses facéties à contre cœur il pouvait parier que cela avait ses limites et qu’il n’hésiterait pas à le sortir à coup de pieds s’il le voyait manger sans retenue. Il allait devoir la jouer fine. Il observa sa montre et vit qu’il restait une heure de TP. Pouvait-il tenir ?

« Tu peux prendre ce que tu veux. Je vois dans tes yeux que tu as faim. Sinon pourquoi me bassiner avec ma boulangerie ? Et parce que je suis un homme de parole je t’y emmènerais et te ferais goûter nos spécialités. A condition que tu me promettes de ne pas te jeter sur un passant qui posera les yeux sur toi ! » dit-il avec un clin d’œil. Il sourit une nouvelle fois. Abel n’avait pas raté ce qu’avait dit la jeune fille. Même si elle l’avait dit sur le ton de la plaisanterie, le français avait décidé de lui offrir ça. Une bonne pâtisserie française. Tartes, brioches, crèmes, la France était réputée pour pas mal de choses mais surtout pour sa gastronomie. Et Abel avait grandi auprès d’une femme, sa grand-mère, qui lui donna la passion de la cuisine, le goût de l’authentique et du plaisir. Alors s’il pouvait faire découvrir ou même juste faire plaisir il le ferait. La générosité était une de ses faibles qualités. Il déchira délicatement l’emballage qui renfermait une madeleine. Le petit bruit à l’ouverture fut couvert par le fond sonore qui émanait de la salle. Il souffla, concentré sur sa tâche et d’une traite mit le gâteau entier dans sa bouche. Il fit les grands yeux puis essaya de sourire à Casey. Ce fut plutôt une grimace. Il mâcha, apprécia puis avala la madeleine avant de se remettre à parler.

« J’en fais aussi de la pâtisserie, un de mes nombreux talents vois-tu ? A l’occasion je t’en ferais goûter aussi ! Tu as déjà mangé des desserts français ? » demanda t-il en la regardant. Il plaisantait bien sur cette prétention à faire de la cuisine, parce que s’il était bien une chose que ne pouvait pas reprocher à Abel c’était d’être prétentieux. Il pratiquait aussi l’autodérision, et même s’il était vrai qu’il cuisinait depuis longtemps, cela ne faisait pas de lui pour autant un grand chef. Et comme toujours lorsqu’on lui parlait de nourriture rien d’autre n’existait. Il avait maintenant oublié le cours de biologie. De toute façon ils avaient bien avancé et il ne leur restait que, au jugé, quelques expériences à réaliser. Ce qui ne leur prendrait pas toute l’heure.

La plus grande peur d’Abel? Il aurait honte de le dire tellement c’était stupide. Mais comme c’est une pensée il ne risquait pas de mourir d’humiliation. Parce qu’en réalité rien ne pouvait l’atteindre, rien ne pouvait déteindre sur lui et pourtant si on savait cette peur les gens riraient à coups sûrs et il n’était pas sûr de s’en relever. Le jeune homme n’avait pas peur des araignées, du noir, de la mort ou encore du sang. Deux choses pouvaient cependant lui causer de l’effroi : les clowns et mourir le ventre vide. La dernière méritait un instant d’attention. Abel avait grandi dans une tradition mixte au niveau religieux. Celle chrétienne maternelle et celle hindoue paternelle. Dans la deuxième la réincarnation et la vie après la mort étaient un sujet important et il avait fini par s’en faire des idées, des notions, son propre avis en somme. Il en était arrivait au résultat que si son esprit survivait et qu’au moment de sa mort il avait eu faim, eh bien cela équivaudrait à une éternité de ventre vide. Et son estomac vivant ou fantomatique ne pourrait se le permettre. Voyez-vous jusqu’à quel point ce jeune homme était un addict de la nourriture ? Il y avait deux natures en lui pour ce domaine-là. Un Abel hyperphagique, prêt à engloutir n’importe quoi n’importe quand parce qu’il ressentait la faim. Ce Abel vivait pour manger et ne lésinait pas sur les moyens, il fallait voir son budget nourriture pour un mois ! Bref cette partie de lui sautait sur la bouffe comme la misère sur le pauvre monde. Il ne savait pas et sans doute ne cherchait pas à savoir trop d’où ça lui venait. L’autre Abel était un gourmet. Véritable cordon bleu élevait aussi la dans des traditions culinaires variées où la préparation était au rang d’art de vivre. Cet Abel-là respectait les aliments, aimait beaucoup les préparer, les transformer et surtout offrir aux autres de bons moments d’extases culinaires. La cuisine, c’était sacré pour le jeune homme. Abel gourmet mangeait délicatement, appréciait toutes les saveurs et toutes les nuances qu’un plat pouvait lui apporter. Tantôt plutôt sucrée, le jour d’après salé, il aimait passer du temps en cuisine pour concocter et inventer de nouvelles choses. Ses amis aimaient venir chez lui, et à les entendre quand on y entrait on était tout de suite mis en appétit par les douces odeurs qui flottaient dans l’air. Epices, herbes aromatiques, sucres et chocolats, on pouvait presque croire à l’arrière salle d’un restaurant quand on allait chez lui. Tout ça pour dire que même si cela rappelait les petits écoliers, son sac ou même à défaut, ses poches, étaient toujours remplis de bonnes choses à grignoter. Il ne fallait pas grignoter entre les repas ? Il s’asseyait royalement sur cette phrase. Il mangeait quand il avait faim, un point c’est tout.

Abel observait Casey qui avait finalement accepté la madeleine et sa compagnie. Il l’avait vu se moquer de lui lorsqu’il avala tout rond la première madeleine et malheureusement il n’eut pas de quoi la vanner sur sa manière de manger. Elle le faisait normalement, pas comme lui. On aurait dit un ogre mangeant à côté d’une princesse Disney. La vision de Shrek et de Fiona lui vint en tête et lui fit sourire au moment où la jeune femme affirmait qu’elle serait ravie de goûter à la pâtisserie française qu’elle ne connaissait pas. Il fallait dire que la gastronomie française était mondialement connue et reconnue mais que cela restait très souvent de l’ordre de recette dans les magazines, et assez souvent les desserts présentés dans les bons restaurants. Ce n’était pas vraiment ce que le commun des américains avait sans aucun doute l’habitude de cuisiner. Après tout c’était culturel il n’en tenait aucune rigueur.

« T’empoisonner ? Pas la peine, il suffit de te suivre pour te faire peur, je réserverais le poison pour quelqu’un de moins … parano ! Non parce qu’avec toi tu seras tout de suite sur le qui-vive prête à faire goûter un plat à une autre personne avant de le manger. » Il lui tira généreusement la langue avec un sourire à la fin. Le français, fronça les sourcils un instant quand Casey parla d’une certaine épreuve dans l’après-midi. Apparemment elle avait un examen. Il la vit soudainement plonger dans un autre état, une sorte de torpeur nostalgique ou bien une mélancolie spontanée, il n’aurait su le dire. Empathique, il ne put s’empêcher de baisser la tête. Mais ce monstre d’optimisme ne se laissait pas attacher sans rien faire. Il sourit à nouveau comme illuminé par la clarté céleste. Il allait parler quand le professeur se leva de son bureau et commença à ramper parmi les expériences, critiquant ci et là quelques mauvaises manipulations ou tout simplement tirant sur le premier qui bouge pour libérer l’énorme frustration accumulée depuis des dizaines d’années. Abel reprit en main un stylo et nota quelques formules qu’il pensait justes et regarda la feuille. Ils ne leur restaient que deux expériences et moins d’une demi-heure. Serré mais dans les temps. Il chuchota à Casey.

« Si tu réussi ton épreuve je te fais un repas. Sinon, tu n’auras que la boulangerie pour te consoler. Et tu as intérêt de réussir, je ne cuisine pas pour les nulles ! » lança t-il en lui donnant un coup de coude léger pour la déstabiliser dans sa posture. Le professeur passa près d’eux mais sembla ne pas vouloir s’attarder sur la table de ses deux grands perturbateurs scolaires. Il n’avait même pas eu le temps de cacher l’emballage des madeleines, mais réflexion fait il s’en fichait.

« Il a peur de nous tu crois ? Moi je crois qu’il a surtout peur de toi. Surtout avec cette tête de déterrée. Enfin … J’en ai jamais vu mais je suis sûr qu’ils te ressembleraient un peu. Un peu j’ai dit. »

[HJ : on le cloture et on fait la suite ? Je la ferais si tu veux ]