Mon histoire est celle d'une promesse brisée, impossible à réparer sans l'aide d'une baguette magique. Malheureusement ce jour-là j'ai compris que la magie n'était qu'une douce illusion faisant partie intégrante des contes de fées pour bercer l'enfance des plus jeunes générations. Un bien pour un mal, car à force d'être trop protégé, nous finissons par nous croire invincible, ou plutôt à l'abri de tous dangers. Quelle naïveté ! Comment ai-je pu croire que le bonheur serait éternel, que la vie était une alliée et non fourbe en reprenant ce qu'elle vous a offert par le passé.
« L'enfance. L'âge de la vie où tout semble possible,
où on imagine qu'il suffira de vouloir changer son destin. »
[Gilles Archambault]
Mon père, architecte de grande renommée, eut le coup de foudre pour ma mère qui n'était rien d'autre que l'une de ses clientes. Immédiatement, il fut frappé de plein fouet par sa joie de vivre, sa volonté de venir en aide à son prochain. Lui ? Son humour bien sûr, après tout ne dit-on pas ‘femme qui rit à moitié dans ton l...’oups, je m'égare, veuillez m'en excuser ! Quoiqu'il en soit, il avait ce petit plus qu'elle ne trouvait pas chez les autres hommes. Vous savez, ce petit quelque chose qui vous donne l'impression que c'est le bon, l'unique personne qui fera battre votre cœur. Ce fut donc sans grande surprise qu'ils eurent leur premier rendez-vous une semaine plus tard, apprenant à se connaitre l'un l'autre. Et plus les années passèrent, plus ils devinrent complices. Naturellement, ils se mirent en ménage pour finalement ne faire plus qu'un par les liens sacrés du mariage. Ce n’est que peu de temps après cette union que je fis mon apparition, le deux mars 89 pour être précis. A partir de là, je fus plongé dans ce que certains appellerons le monde des bisounours, car je n'ai jamais eu à me plaindre, j'étais l'enfant chéri et tant attendu qui faisait le bonheur de ses parents.
Très jeune, je reçue des cours de maintien digne des plus hautes sphères de la bourgeoisie. Ce n'était pas toujours très drôle mais, la fierté que je pouvais lire dans le regard de mes parents suffisait à me combler et à oublier leurs extravagances. Au collège, je fus désigné comme 'le fils à papa' par excellence. Bonne notes, bonnes fréquentations, je faisais toujours en sorte de ne jamais contrarier mes parents, j'étais l'enfant modèle. Jusqu'au jour où elle fit son apparition, un jour d'automne alors que nous, quelques amis et moi, quittions le bâtiment pour prendre la direction du gymnase après une dure journée de cours. Vous auriez dû la voir... Elle était magnifique, pour ne pas dire splendide. Ses yeux verts, son sourire de rêve... Je fus immédiatement sous son charme, tout comme de nombreux autres garçons. Mais savez-vous ce qu'il y avait de plus beau dans tout ça ? Elle était toute aussi belle à l'intérieur qu'à l'extérieur. Elle était LA perle rare, mais aussi mon premier amour.
Ah qu'il me fallut de nombreuses tentatives pour l'approcher. Car ce que j'ignorais, c'était que l'amour ne vous rendait pas seulement aveugle mais bel et bien tout aussi maladroit. Je ne compte plus les bégaiements, les piles de livres tombés faute de les avoir lâchés chaque fois que nos chemins se croisaient. Finalement, c'est au cours d'une fête d'anniversaire que j'eue le courage de lui adresser la parole pour la première fois.
« Hum...salut, je me demandais si tu euh...si tu acceptais de euh... Tu danses ? » Et oui, à 15 ans on manque d'expérience...du moins c'était mon cas.
« Seulement si tu me promets de ne pas m'écraser les pieds ! » Elle avait le dont de vous mettre à l'aise, de vous faire rire dans les pires moments. Il faut dire que son visage aux allures angéliques vous mettait immédiatement en confiance. Ainsi j'eue la chance de faire sa connaissance, mais aussi de sortir avec elle.
Il ne fut pas bien longtemps à mes parents pour comprendre le déclin de mes notes. Bien sûr, ils virent cette relation d'un mauvais œil et firent tout ce qui était en leurs pouvoirs pour me remettre dans le droit chemin, mais je ne les écoutais pas. J'étais dans ma bulle, heureux et amoureux. Rien d'autre ne comptait, pas même la déception qui naissait dans le cœur de mes parents. Trois années s'écoulèrent sans qu'aucuns nuages ne viennent perturber cet équilibre qu'elle et moi formions, je nous croyais invincibles, bien loin de me douter qu'à l'aube de mes 18 ans, tout ceci prendrai fin....
Il y a 4 ans, New York
« Qui est SAM ce soir ? » « C'est moi ! Je boirais des cocktails sans alcools, c'est prooommiiss !! Bon je vous cache pas que ça me saoul mais bon, chacun son tour hein !! Et puis qu'est-ce que je ne ferai pas pour mon Drakounet !!! » « Ne m'appelle pas comme ça.» Je vous présente Nate, celui qui était autrefois mon meilleur ami. Un peu foufou sur les bords mais l'on pouvait compter sur lui, du moins c'est ce que je croyais. Ce soir-là il devait s'abstenir de boire, être celui qui nous ramènerait tous a bon port. Malheureusement nous étions trop ivres/joyeux pour nous rendre compte qu'il ne parvint pas à tenir sa promesse, tombant dans les filets de Dionysos.
« Tu es sûr que tu peux conduire ? T'a pas l'air bien Nate ! » « heu..hein ? Quoi ? Comprend pas ! » « Il est complètement saoul Drake » « Je vais conduire » « T'es sur ? » « Mais oui, ça fait un moment que je n'ai pas bu, ne t'en fais pas. » Un baiser suffit à la rassurer, abusant de mon emprise sur elle pour qu'elle n'insiste pas davantage. Je m'en pensais réellement capable, je me sentais bien, juste...heureux. Qui ne l'aurait pas été ? Une super soirée d'anniversaire, une fille que vous aimez a votre bras et de bons amis pour assurer l'ambiance, que demander de plus ? Mais ce que je pensais être le bonheur à l'état pur n'était en fait qu'un des effets euphorisant des cocktails ingurgités au cours de la nuit.
« Draaaaaaaaake » Sa voix résonne encore en moi, comme ci c'était hier... Plusieurs jours furent nécessaires pour me réveiller. J'aurai dû m'abstenir...car la douleur de sa perte n'était en rien égale à celle ressentie dû à notre accident.
Un enfant juge selon son cœur, un adulte selon les actes.
[Proverbe indien]
Cet accident marqua la fin de mon enfance, je ne fus plus le même, comme ci quelque chose en moi était définitivement mort. Plus rien ne m'intéressait, les études, mes amis, tous n'était plus qu'un vague souvenir que je désirais oublier a jamais. Seules les soirées alcoolisées trouvaient encore de l'intérêt, oubliant le temps de quelques heures, tout remords.
« Il faut que tu te reprenne !!! C'était un accident ! Et cette fille, c'est triste mais, ce n'était qu'une amourette. Tu en retrouveras d'autres !!! Il faut que tu arrêtes de te détruire comme ça, tu m'entends ? »Sa mort agrandit également le fossé qui s'était peu à peu creuser entre mes parents et moi. Ils ne me comprenaient pas, n'imaginaient pas à quel point elle pouvait compter pour moi.
« Stacey ? » « Oui ? » « Joyeuse Saint-Valentin » « Qu'est-ce que c'est ? Ne me dis pas que tu me demandes en mariage ?! Il est peut-être tant que je te le dise : tu regardes trop de films » « T'es bête ! Non c'est une promesse, celle que je serais toujours là pour toi » [/b] Une promesse que je ne fus pas capable de tenir. Comment en vouloir alors a Nate, ou encore à mes parents lorsqu'ils prirent la décision de me mettre dans une sorte de centre militarisé chargé de vous reprendre en main. Faute de ne plus pouvoir contrôler leurs fils alors âgé de vingt ans.
Il y a deux ans, quelque part en Amérique
« Qui êtes-vous Drake ? » « Je ne comprends pas votre question, désolé.» « Dites-moi simplement qui vous êtes. » « Vous devez le savoir non ? Vous connaissez mon prénom après tout ! Et je suis sûr que ce joli petit dossier en dit davantage, je me trompe ? » Elle me scrutait sans relâche, ne lâchant pas mon regard un seul instant comme ci celui-ci s'apprêtait à lui livrer une information de la plus haute importante. Ce ne fut guère le cas, jouant au jeu du chat et de la souris chaque fois qu'elle me convoquait dans son bureau dans l'espoir d'avancer sur le cas Caldwell. Sans grand succès ! Au premier entretien, j'ai compris que son grand amour n'était autre que Sushi, son chat et dont les photos couvraient une grande partie des murs de son bureau. Pas très professionnel si vous voulez mon avis ! Ses sautes d'humeurs quant à elles, m'indiquèrent que la demoiselle tentait en vain d'arrêter de fumer. Bon bon je le reconnais, je suis mauvaise langue, en réalité elle ne prenait tout simplement pas la peine de cacher ses patchs anti tabac qui trônaient régulièrement sur le coin de son bureau. Ainsi en quelques mois, j'en sû plus sur elle, qu'elle sur moi. Ce n'était pourtant pas faute de l'avoir prévenu et ce, a maintes reprises !
« Il faut vous ouvrir au monde, votre vie est loin d'être terminée. » « Ne le prenez pas mal, mais ce n'est certainement pas ici et avec vous, que je pourrais profiter de la vie. Et puis, c'est bien pour ça qu'ils ont décidés de m'envoyer dans ce trou à rats non ? Pour que je cesse d'en profiter ? » Je devinai à son sourire qu'elle n'était guère de mon avis, que tout comme mes parents, elle était convaincue que je jouais surtout avec ma vie en ayant des comportements à risque. Ils n'avaient pas tort, seulement je n'étais et je ne suis toujours pas disposé à leur avouer.
« Que portez-vous autour de votre cou » Nous y étions, las de mon attitude désinvolte, elle se permit de m'attaquer sur L'UNIQUE sujet de conversation encore susceptible de me faire un tant soit peu réagir. C'était bien sûr l'effet recherché ! D'ordinaire j'aurai répliqué, trouvé une réplique cinglante, mais j'en étais d'ores et déjà incapable sans prendre le risque d'y laisser transparaitre ma souffrance, cette colère qui se trouvait au plus profond de mon être.
« ... » « Parlez-moi d'elle Drake, parlez-moi de Stacey. » « J..Je vous interdis » « Vous vous punissez de ce qui lui est arrivé » « Taisez-vous, taisez-vous, TAISEZ VOUS !!! Elle allait trop loin...beaucoup trop loin...en un instant, mes mains devinrent moites tandis la colère s'immisçait peu à peu sur mon visage. J'étais comme coupé du monde, n'entendant plus que les battements de mon cœur qui s'accentuaient sous l'émotion. La rage l'emportait sur la raison, si bien que les bibelots présents sur le bureau de Miss Johnson firent un vol plané pour s'écraser un peu plus loin sur le sol. Ce qui s'en est suivi reste des plus flou, mais si j'en crois le personnel de l'établissement, ils durent me maitriser et me mettre à l'isolement. La psychologue et le reste de l'équipe firent de nouvelles tentatives, mais eux comme mes parents n'eurent d'autre choix que d'admettre l'évidence : en deux ans dans un centre juvénile, aucuns progrès fut constaté. J'étais ce qu'on appelle encore un cas difficile.
Il y a quelques mois, New York
La liberté retrouvée, mes parents et moi avons eu une longue conversation sur l'avenir. Il m'était impossible de vivre à New York plus longtemps, trop de souvenirs y étaient rattachés. C'est pourquoi je fis une proposition à mes parents et qu'ils l’acceptèrent, à ma plus grande surprise, avec entrain : mon indépendance, contre la poursuite de mes études. Bon élève autrefois, nous savions tout trois qu'il ne me serait pas bien difficile de trouver une université qui accepterait de me donner une chance. FRATERNITIES me voici !!!!